Le mot du PDG du CPQ, Yves-Thomas Dorval | 3 février 2016
Avec le récent remaniement ministériel, le premier ministre du Québec a voulu ouvrir un nouveau chapitre de son gouvernement en réponse à la léthargie de l’économie québécoise, une situation qui inquiète le milieu des affaires depuis quelque temps. À la veille de la réouverture de l’Assemblée nationale la semaine prochaine, et dans la perspective d’un nouveau budget, il nous semble essentiel que les priorités du gouvernement renouent davantage avec les principaux défis économiques de notre époque et pour les années à venir. Nous proposons ici trois pistes de réflexion.
Priorité #1 – L’économie: un discours inclusif, mobilisateur et positif
Stimuler l’économie signifie avant tout de savoir mobiliser ses acteurs, de donner aux investisseurs et aux entrepreneurs les moyens de leurs ambitions. Le gouvernement doit s’engager de façon cohérente pour favoriser un environnement d’affaires stable et prévisible, qui n’est pas sujet aux saveurs du jour, mais qui découle d’une volonté d’offrir un terreau fertile pour les projets de développement.
Le gouvernement ne devra ménager aucun effort pour raviver le goût de la réussite et pour susciter davantage d’investissements privés dans tous les secteurs de l’économie. Le développement économique doit redevenir rassembleur, inclusif et attrayant, autant pour les investisseurs et les entreprises que pour l’ensemble des Québécois, qui doivent renouer sans complexe avec la fierté de prospérer.
Priorité #2 – L’économie: stimuler par l’innovation et la formation
À l’aube du XXIe siècle, il est grandement temps que le Québec saute à pieds joints dans la quatrième révolution industrielle. Le développement et l’innovation technologique, l’avènement de l’économie numérique et de ses nouveaux modèles de conception, de production et de partage, l’implantation tout azimut de modes de gestion qui tiennent compte des exigences des générations montantes, la transition vers une économie plus sobre en carbone : voici autant de composantes de ce virage que le Québec doit entreprendre pour figurer en avant de la parade et s’adapter plutôt que de subir.
Cette mouvance doit se traduire par des stratégies concrètes et concertées pour répondre aux besoins des secteurs à fort potentiel de création de valeur pour notre économie (traditionnels ou émergents). Il faut pour cela miser sur des piliers incontournables. En premier lieu : l’éducation, incluant l’éducation financière et économique. Du primaire à l’université, c’est ici que se bâtit l’avenir de notre société et où la soif d’apprendre et d’entreprendre doivent s’enraciner davantage. Ainsi, nous pourrons former une main-d’oeuvre de qualité qui pourra répondre rapidement et efficacement aux besoins du marché du travail dans notre contexte démographique vieillissant. Ensuite, le signal envoyé par un nouveau ministère de l’Économie, désormais responsable des Sciences et de l’Innovation ainsi que de la Stratégie numérique, devra agir comme un lieu de convergence à optimiser pour allier le développement économique aux défis technologiques contemporains, et ce, en favorisant davantage l’action conjointe des universités avec des entreprises. Enfin, les ministères de l’Énergie et des Ressources Naturelles, des Transports et des Affaires Municipales devront jouer un rôle éminemment stratégique dans les discussions entourant les projets majeurs d’infrastructure, dans le contexte de réinvestissement fédéral annoncé, et face à l’adaptation aux changements climatiques.
Priorité #3 – L’économie: moderniser l’État
Il faut poursuivre les efforts de réduction du fardeau fiscal des particuliers et des entreprises, de même que poursuivre les efforts amorcés en matière d’allégement réglementaire. Par contre, il reste fort à faire pour moderniser la machine étatique. Le gouvernement doit garder le cap sur son objectif d’équilibre budgétaire, tout en procurant des mesures de soutien efficaces et efficientes au développement économique et en soulageant son appareil bureaucratique. Il devra accepter de moderniser en profondeur ses processus et ses réseaux, notamment en ce qui concerne les approvisionnements, en conjuguant aux valeurs du public, la souplesse et l’efficacité du privé.
Nous avons le devoir collectif de nous engager dans une promesse à l’égard des générations futures, soit prospérer sans nuire à leur capacité d’en faire de même. Et l’innovation n’est pas que technologique – elle est sociale, réglementaire, politique, financière, fiscale, économique… Balayée par des vents incertains, la conjoncture économique mondiale, avec ses tendances lourdes, nous rappelle effectivement le besoin de passer en deuxième vitesse, comme le disait monsieur Couillard. Mais le gouvernement ne pourra répondre aux exigences et aux défis de notre époque qu’en tendant une oreille très attentive aux entreprises et aux employeurs, s’il veut se donner les moyens de réaliser sa promesse d’une société meilleure et plus prospère.