Des relations de travail plus saines qu’au siècle précédent

En 1976, chaque employé syndiqué perdait en moyenne 8 jours de travail en raison d’une grève ou d’un lock-out. En 2017, ce ratio est passé à une demi-journée par employé syndiqué. Voilà une statistique qui montre à quel point le climat de travail s’est amélioré au Québec au cours des dernières décennies.

« On a beaucoup moins de conflits de travail qu’avant, rappelle l’ex-président du CPQ, Ghislain Dufour. Et ceux qu’on a encore ont généralement beaucoup moins d’envergure qu’à l’époque. »

L’époque dont parle M. Dufour est celle des années 1970, une décennie qui a connu son lot d’affrontements musclés entre employés et employeurs. Pour mémoire, rappelons le débrayage des 2 400 pompiers et des 3 700 policiers de Montréal, le 7 octobre 1969 : une métropole plongée dans le chaos, plus de 450 vols avec effraction commis en une seule journée, un gouvernement prêt à voter des mesures d’urgence… Et n’oublions pas la grève générale illimitée déclenchée le 11 avril 1972 par le Front commun intersyndical, représentant 210 000 employés des secteurs publics et parapublics. Il aura fallu que le gouvernement de Robert Bourassa vote la célèbre « Loi 9 » pour forcer le retour au travail des employés de l’État. Mentionnons aussi la grève de la United Aircraft (division de Longueuil) en 1974, l’un des pires conflits de travail de l’histoire du mouvement ouvrier québécois : 2 000 travailleurs sur les piquets de grève, le recours à des briseurs de grève, des actes de vandalisme et de voies de fait sur des non-syndiqués. Une grève qui s’étirera pendant près d’un an et demi.

Bref, nous étions loin des « pantalons de clown », le moyen de pression moderne des policiers de Montréal !

De l’opposition à la concertation

Pourquoi les grandes grèves au Québec sont-elles moins fréquentes que jadis ? Les raisons sont multiples. « L’économie du Québec est de plus en plus dominée par le secteur tertiaire, souligne Ghislain Dufour. Ce secteur est peu syndiqué comparativement au secteur industriel. D’autres tendances entrent aussi en ligne de compte : la montée du travail autonome, les valeurs des milléniaux, une meilleure gestion du personnel dans les entreprises, la création du CPQ, puis du Fonds de solidarité FTQ et de Fondaction par la CSN ». Ce climat de travail plus cordial est aussi la somme d’une foule de petites avancées qu’on peut vite oublier, comme le déplafonnement de la durée des conventions collectives — une idée chère au CPQ. Avant 1994, la durée des conventions collectives était fixée à 3 ans. Aujourd’hui, un grand nombre d’entreprises s’entendent sur des conventions collectives de plus longue durée ; signe que la confiance s’installe entre les employés et les employeurs.

« Dès l’arrivée en scène du CPQ, ajoute Ghislain Dufour, nous sommes aussi entrés dans une ère de concertation, où les différents acteurs du monde du travail multiplient les occasions de s’asseoir à la même table, qu’il s’agisse de sommets, de rendez-vous économiques du secteur privé, d’un forum sur la jeunesse ou sur la main-d’œuvre ou encore au sein de nombreux organismes de concertation de l’État. Ce rapprochement contribue à des relations de travail plus saines en s’appuyant sur une chose que le CPQ a toujours reconnu comme étant l’une de ses valeurs cardinales : le dialogue. »

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