Lettre ouverte par Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ, publiée le 16 janvier 2023 dans La Presse.
Au début de décembre, le gouvernement du Québec a déposé, comme promis, son projet de loi no 2 pour limiter la hausse des tarifs pour les clients d’Hydro-Québec. La mesure qui cadre avec le bouclier anti-inflation présenté en campagne électorale limiterait l’augmentation à 3 %. Et pour cause, l’objectif est tout à fait louable et apprécié en période d’inflation et de resserrement économique.
S’il s’agit d’une bonne nouvelle pour les familles et les citoyens qui ont besoin de souffler, la réalité est tout autre pour les entreprises qui sont écartées du projet de loi. Si ce dernier est adopté tel quel, la majoration du tarif serait entre 4,2 % et 6,4 % au 1er avril 2023. Pour un employeur, qu’il soit petit ou grand, cela représente des milliers, voire des millions de dollars, qu’il faudra absorber d’une manière ou d’une autre.
Les entreprises en ont déjà plein les bras avec la pénurie de main-d’œuvre, l’instabilité des chaînes d’approvisionnement, la hausse du coût des transports et des matériaux et la concurrence féroce à l’international. Dans certains cas, la hausse des coûts de fonctionnement les force à refiler la facture aux consommateurs. Dans d’autres cas, ce sont les marges de profit qui ont fondu. De plus, plusieurs employeurs sortent d’une pandémie avec de lourdes dettes qu’ils n’ont pas encore réussi à éponger.
Alors qu’on fait face à beaucoup d’incertitude économique, est-ce vraiment le moment opportun pour leur imposer une telle hausse?
Est-ce possible de réduire l’augmentation tarifaire proposée pour les entreprises, d’envisager un sursis ou, au minimum, une augmentation graduelle qui soit raisonnable?
L’inflation est évidemment un problème complexe qui se répercute sur tout le monde, le gouvernement y compris. Elle nous oblige à faire des choix déchirants. Mais chose certaine, la spirale inflationniste semble ralentir.
À l’approche des consultations particulières du projet de loi 2, le message du milieu des affaires québécois se doit d’être entendu : il nous faut de la prévisibilité, de la certitude et de la durabilité! Les décisions d’investissement et les stratégies sont basées sur ces composantes essentielles pour mener à bien notre croissance.
Dans une analyse présentée en décembre dernier pour évaluer la prospérité économique du Québec, le Conseil du patronat donnait justement la note de C pour l’environnement d’affaires. La pression fiscale est déjà lourde sur les entrepreneurs. On peut faire mieux, on doit faire mieux. Est-ce qu’on peut leur donner une chance de réussir au Québec?