Lettre ouverte cosignée par Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ, publiée le 17 mars 2023 dans Les Affaires.
Dans quelques jours à peine, le président des États-Unis Joe Biden sera en visite au Canada pour rencontrer son homologue et discuter des enjeux qui unissent nos deux pays. En période de ralentissement et d’incertitude économique, la fragilité engendrée par l’après COVID-19 et les tensions géopolitiques dans le monde devraient être au cœur des discussions entre le président et le premier ministre.
C’est que l’environnement d’affaires s’est radicalement transformé depuis la dernière fois que le président américain a mis les pieds en sol canadien, en janvier 2021. La guerre en Ukraine n’avait pas encore commencé et la menace de récession était une perspective encore lointaine. L’Inflation Reduction Act (IRA) n’avait pas encore été adoptée.
Aujourd’hui, le milieu des affaires est inquiet.
L’IRA, une loi massue qui met le pied sur l’accélérateur dans l’investissement dans les technologies vertes, est déjà en train de bousculer les manufacturiers québécois et canadiens. Dans certains cas, ce pourrait être une impulsion bienvenue pour les entreprises d’ici. Dans d’autres cas, elle agit plutôt comme une menace. Elle pourrait faire perdre d’importantes parts de marché à nos employeurs. L’étude de l’Alliance Switch sortie récemment fait justement état des nombreuses conséquences qui attendent l’économie québécoise et canadienne.
M. Trudeau et M. Biden doivent résister au penchant protectionniste. Les discours de fermeture et de repli sur soi sont devenus une tendance en politique, mais ils ne devraient pas venir limiter les échanges entre nos économies si interdépendantes.
Il est vrai que, de part et d’autre de la frontière, la tentation est forte d’adopter des mesures pour privilégier et protéger nos économies respectives.
Par exemple, l’été dernier, le gouvernement Trudeau a instauré un programme d’interdiction d’achat de propriété pour les étrangers pour deux ans. Cette mesure rebute plusieurs travailleurs qualifiés et investisseurs américains qui étaient intéressés à venir ici et à stimuler notre marché du travail.
Il faut non seulement qu’on reste ouvert au commerce international, mais qu’on renforce nos liens économiques.
Nous avons l’opportunité par exemple de créer un corridor nord-est dans la production de semi-conducteurs. Il y a une manière de conjuguer nos forces et nos expertises pour diminuer notre dépendance à la production asiatique.
Il faut également rapprocher nos chaînes d’approvisionnement pour qu’elles soient plus résilientes et plus nord-américaines.
Le prochain budget du gouvernement du Canada devra tenir compte de tous ces éléments, car nous sommes à la croisée des chemins.
Signataires
Michel Belval, président de la Chambre de commerce américaine au Québec (AmCham)
Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ.