Note juridique de Me Guy-François Lamy, directeur – Affaires juridiques au Conseil du patronat du Québec, publiée le 27 novembre 2014.
La Commission des lésions professionnelles (CLP), par une formation de trois juges administratifs, vient tout juste de rendre une décision[1] visant à mettre fin à une controverse jurisprudentielle sur l’application de l’article 327(1) de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP) en matière d’imputation des coûts associés aux lésions professionnelles.
Par cette décision, la CLP confirme que l’employeur a droit à un transfert d’imputation des coûts associés à une lésion professionnelle sous la base de l’article 327(1) LATMP lorsque cette lésion a été préalablement acceptée par la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) en tant que lésion découlant des soins ou des traitements reçus ou omis en raison d’une lésion professionnelle, en vertu de l’article 31 LATMP.
Autrement dit, lorsqu’un travailleur est victime de complications découlant des soins reçus pour une lésion professionnelle, ces complications pourront être reconnues comme une lésion professionnelle, et l’employeur pourra demander que les coûts qui y sont associés soient transférés à l’ensemble des employeurs.
Par contre, lorsqu’une lésion professionnelle est acceptée par la CSST comme découlant d’une première lésion professionnelle ou de l’événement y ayant donné lieu, même si elle apparaît dans le contexte des soins ou des traitements reçus pour la lésion initiale, l’employeur n’aura pas droit au transfert d’imputation prévu à l’article 327 LATMP.
Ainsi, si la CSST considère que les complications du travailleur développées en cours de traitement constituent plutôt une lésion professionnelle découlant de la lésion initiale, l’employeur ne pourra pas faire transférer les coûts de cette deuxième lésion à l’ensemble des employeurs.
Rappelons que certaines décisions de la CLP étaient d’avis, jusqu’alors, que l’employeur pouvait demander ce transfert d’imputation, malgré la décision de la CSST sur l’admissibilité de la lésion. La création d’une formation de trois juges administratifs par la CLP visait justement à trancher cette controverse.
En somme, dans le traitement d’un dossier, l’importance d’une gestion rigoureuse et attentive de l’employeur, dès l’étape de l’admissibilité, se trouve réitérée par cette décision.
En effet, l’employeur qui s’assure que les lésions acceptées par la CSST sont celles qui doivent réellement l’être, d’une part, et qui s’assure, d’autre part, qu’elles le sont en lien avec le juste motif d’admissibilité (événement initial ou découlant des soins ou traitements), pourra ensuite plus facilement faire appliquer les règles d’imputation des coûts dont il peut bénéficier.
Il est donc d’autant plus important que l’employeur qui voit une nouvelle lésion professionnelle acceptée par la CSST pour un travailleur en lien une lésion professionnelle initiale ou l’événement y ayant donné lieu, mais qui considère qu’elle devrait plutôt être reconnue comme découlant de soins ou de traitements reçus ou omis, conteste la décision d’admissibilité rendue par la CSST afin de pouvoir obtenir ensuite le transfert d’imputation approprié.
Nous reproduisons ici les articles 327 et 31 de la LATMP, pour la convenance du lecteur :
31. Est considérée une lésion professionnelle, une blessure ou une maladie qui survient par le fait ou à l’occasion :
1° des soins qu’un travailleur reçoit pour une lésion professionnelle ou de l’omission de tels soins;
2° d’une activité prescrite au travailleur dans le cadre des traitements médicaux qu’il reçoit pour une lésion professionnelle ou dans le cadre de son plan individualisé de réadaptation.
Disposition non applicable.
Cependant, le premier alinéa ne s’applique pas si la blessure ou la maladie donne lieu à une indemnisation en vertu de la Loi sur l’assurance automobile (chapitre A-25), de la Loi visant à favoriser le civisme (chapitre C-20) ou de la Loi sur l’indemnisation des victimes d’actes criminels (chapitre I-6)
327. La Commission impute aux employeurs de toutes les unités le coût des prestations :
1° dues en raison d’une lésion professionnelle visée dans l’article 31;
2° d’assistance médicale dues en raison d’une lésion professionnelle qui ne rend pas le travailleur incapable d’exercer son emploi au-delà de la journée au cours de laquelle s’est manifestée sa lésion.
Me Guy-François Lamy
Directeur – Affaires juridiques
Conseil du patronat du Québec
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* La présente note d’information ne constitue pas un avis
[1]. Canadelle s.e.c. et Commission de la santé et de la sécurité du travail, 2014 QCCLP 6290. Au moment d’écrire ces lignes, nous ignorons si les parties ont l’intention de demander la révision de cette décision.