Une occasion historique de renforcer l’espace économique du continent

Lettre ouverte du président-directeur général du Conseil du patronat du Québec, Yves-Thomas Dorval.


La Presse+, p. web / Huffington Post Québec, p. web – 24 août 2017


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La renégociation de l’ALENA, dont le premier cycle de discussions vient de se terminer, représente une occasion historique pour le Canada et le Québec de renforcer le partenariat et l’intégration économique avec les trois pays membres, au bénéfice de leurs travailleurs et de leurs entreprises. Cet accord, qui a défini les économies nord-américaines depuis 1994, a constitué la pierre angulaire de notre sécurité et de notre croissance économique, en faisant du continent notre espace commercial le plus important. Cette renégociation représente donc une opportunité à saisir, car elle permettra de tenir compte des changements structurels de l’économie qui ont eu lieu au cours des deux dernières décennies, tout en protégeant les éléments bénéfiques aux différents pays.

Plusieurs dossiers sont sur la table et peuvent être sujets à une modernisation, dont l’harmonisation des conditions de travail et des normes environnementales, la réglementation du commerce électronique, les procédures douanières ou encore le système de gestion de l’offre et l’exception culturelle, dont le Canada doit assurer la protection. Cela dit, afin de ne pas nuire à la compétitivité des exportations des trois pays, et, ultimement, ne pas voir une hausse des prix et une réduction de l’offre des produits pour les consommateurs, il est fondamental que soit préservée la fluidité des échanges pour les entreprises.

En fait, au fil du temps, l’ALENA a permis de créer des chaînes de valeurs (d’approvisionnement) complexes dans plusieurs secteurs par-delà les frontières, ce qui a engendré des milliards de dollars en valeur ajoutée dans chacune des trois économies. Que l’on pense aux secteurs de l’agriculture, de la transformation alimentaire, de l’aéronautique, de l’automobile, de l’aluminium ou du transport, il y a un important flux de biens intermédiaires qui circulent entre les deux pays et qui peuvent traverser la frontière plusieurs fois avant l’assemblage et la vente du produit final.

À titre d’exemple, l’industrie de l’aluminium est emblématique de cette tendance plus large. Le Canada est le premier fournisseur d’aluminium primaire des États-Unis, alors qu’il est également la première destination de l’aluminium transformé américain. Ces échanges commerciaux reflètent les avantages concurrentiels des deux États dans différents segments du secteur de l’aluminium. Produit par près de 10 000 Canadiens, l’aluminium primaire canadien est en grande partie exporté vers les États-Unis où près de 160 000 Américains le transforment afin de répondre à leurs besoins dans les secteurs des transports, du bâtiment et de l’emballage. Ces mêmes biens sont par la suite consommés sur place ou exportés. C’est ainsi que le Canada génère annuellement 7 milliards de revenus en exportant son aluminium vers les États-Unis.

Un haut niveau d’intégration économique est un élément clé de la prospérité d’un pays. La raison est simple: l’approvisionnement des biens intermédiaires à l’étranger améliore la qualité des produits et diminue les coûts de production, ce qui rend les firmes plus concurrentielles sur le marché international et, par conséquent, soutient des emplois et des salaires au pays même. C’est pourquoi nous disons que nous sommes tous interdépendants dans ce genre de marché commun et que la relation commerciale peut être gagnant-gagnant-gagnant.

En fait, puisque l’exportation exige une grande compétitivité, celle-ci demande de recourir aux approvisionnements étrangers afin de réduire autant que possible les coûts de production. Ainsi, toute mesure protectionniste pourrait nuire grandement aux entreprises les plus dynamiques, aux chaînes de valeurs et, ultimement, aux économies en jeu.

Si des éléments de l’ALENA sont donc aujourd’hui perfectibles ou à moderniser, ou que certains seront l’objet de discussions plus ardues, il demeure que sa renégociation doit représenter une occasion extraordinaire de consolider des acquis historiquement bénéfiques aux trois pays et de renforcer la compétitivité de leurs industries à l’échelle mondiale.

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