Lettre ouverte cosignée par Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ, publiée le 21 novembre 2024 dans Le Journal de Montréal.
Les entreprises du Québec n’ont pas la vie facile par les temps qui courent. Après la COVID-19, la pénurie de main-d’œuvre, les poussées inflationnistes et le protectionnisme croissant aux États-Unis, voilà qu’une autre tuile menace de s’abattre sur elles: la hausse des tarifs d’électricité industriels qui pourraient augmenter de 60 % d’ici dix ans en raison de la réforme énergétique du gouvernement. Imaginez que votre loyer ou votre hypothèque subisse soudainement une hausse aussi drastique. Pour la plupart d’entre vous, déménager deviendrait une évidence.
Sachant que les coûts de l’énergie représentent souvent entre 20 % et 60 % des coûts d’exploitation ou de production des entreprises, cette hausse menace directement le tissu économique du Québec et des milliers d’emplois, tout particulièrement dans les régions, là où il y a forte concentration d’entreprises manufacturières. Pour ces régions, l’augmentation anticipée équivaut à une taxe sur leurs emplois.
Alors que l’étude de la réforme de l’énergie revient dans l’actualité, nos sept organisations unissent leur voix pour réclamer un changement de cap. Regroupées sous la bannière de l’Alliance pour la compétitivité énergétique du Québec (ACEQ), nous exhortons le gouvernement à changer d’orientation et à agir maintenant pour protéger l’économie des régions du Québec.
L’eldorado des tarifs d’électricité: un mythe à déconstruire
Le Québec a longtemps bénéficié de tarifs d’électricité moins chers qu’ailleurs, un avantage stratégique qui lui a permis de bâtir une économie forte, d’attirer des investissements et de se positionner à l’échelle internationale. Cette époque est toutefois révolue.
Tandis que les tarifs sont stables ou même à la baisse chez nos voisins, le Québec se dirige dans la direction opposée. Avec ce qu’il propose dans sa réforme actuelle, le gouvernement de la CAQ accélère l’érosion de notre compétitivité énergétique. Cette situation pourrait entraîner une spirale de désinvestissements et mettre en péril des emplois.
Un équilibre entre les profits d’Hydro-Québec et la vitalité économique du Québec
Nos organisations ne demandent pas une électricité à rabais au gouvernement, ni de faveur pour les entreprises. Nous sommes conscients des défis liés à la transition énergétique et de la hausse inévitable des tarifs. Il ne sert à rien d’opposer les tarifs résidentiels à ceux des entreprises. Nous avons tous les mêmes préoccupations.
Ce que nous réclamons, c’est que les tarifs d’électricité demeurent compétitifs et soient établis de façon transparente et prévisible, en fonction du coût réel pour Hydro-Québec, incluant un profit raisonnable, le tout déterminé par un organisme tiers et impartial, la Régie de l’énergie. La recherche de revenus pour le gouvernement du Québec ne doit pas se faire aux dépens de la vitalité économique du Québec et de ses emplois. Un juste équilibre doit être trouvé dans l’intérêt supérieur de toutes les clientèles et du Québec dans son ensemble.
Les choix du gouvernement en matière de tarifs d’électricité auront des répercussions sur l’ensemble de l’économie du Québec, et particulièrement dans les régions où les entreprises de toutes tailles sont souvent le moteur économique. Les effets se feront ressentir autant par les PME qui gravitent autour des grandes industries que par les travailleurs et leurs familles.
Il est encore temps pour le gouvernement d’ajuster sa réforme. Car si plusieurs facteurs de la compétitivité des entreprises échappent au contrôle direct du gouvernement, ce n’est pas le cas pour l’établissement de la tarification de l’électricité. Nous lui tendons la main pour collaborer et trouver des solutions qui assureront la pérennité de nos entreprises.
Signataires
- Jocelyn B. Allard, président, Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité
- Karl Blackburn, président et chef de la direction, Conseil du patronat du Québec
- Dimitri Fraeys, vice-président, Innovation et Affaires économiques, Conseil de la transformation alimentaire du Québec
- Yves Hamelin, directeur régional, Québec, Association canadienne de l’industrie de la chimie
- Jean-François Samray, président-directeur général, Conseil de l’industrie forestière du Québec
- Jean Simard, président et chef de la direction, Association de l’aluminium du Canada
- Julie White, vice-présidente des affaires publiques et porte-parole par intérim, Manufacturiers et exportateurs du Québec