Lettre ouverte cosignée par Karl Blackburn, président et chef de la direction du CPQ, publiée le 23 novembre 2024 dans Le Soleil.
Depuis quelques semaines, nous assistons avec consternation à la fermeture de centaines de classes en francisation dans les milieux scolaires, touchant la plupart des régions du Québec.
Derrière cette décision inattendue du ministère de l’Éducation se déroulent de véritables drames humains. Nous accueillons des gens de partout à travers le monde qui ont en commun d’avoir choisi le Québec, mais aussi d’avoir été choisis par leur société d’accueil, c’est important de le rappeler.
Ces personnes s’établissent ici avec l’intention de contribuer à bâtir le Québec à nos côtés. C’est l’une des décisions les plus importantes de leur vie, laquelle appelle en retour de faire preuve d’humanité et d’empathie à leur endroit.
Notre gouvernement est en train de rompre sa part du contrat en leur retirant brusquement l’un des leviers d’intégration les plus importants : l’apprentissage de notre langue commune, le français. Sans elle, ils font également face à une embûche supplémentaire pour faire reconnaître et respecter leurs droits.
Au surplus, ce sont les membres du personnel scolaire à l’œuvre auprès de ces personnes qui sont en première ligne à recevoir leurs angoisses et leurs interrogations alors qu’eux-mêmes en subissent également les conséquences. Au bas mot, nous savons déjà qu’ils seront plusieurs centaines à perdre leur emploi tandis que bien d’autres verront leur tâche être considérablement amputée.
Alors que le gouvernement exige désormais un meilleur niveau de français pour les néo-Québécois, il leur coupe les ailes en diminuant drastiquement les différents services en francisation. Cet automne, l’allocation aux personnes immigrantes pour les cours de français à temps partiel et l’allocation pour la francisation versée aux entreprises de 100 employés et plus ont également été abolies.
En retirant ces incitatifs financiers, on risque de freiner l’intégration durable des travailleuses et travailleurs non francophones et d’accroître les risques pour la santé et la sécurité. La maîtrise de la langue commune s’avère nécessaire pour permettre aux employeurs de former adéquatement leur main-d’œuvre tout autant que pour respecter le droit à travailler en français. C’est pourquoi le gouvernement devrait soutenir et faciliter la francisation dans les milieux de travail.
Nous demeurons convaincus que la francisation est essentielle pour atteindre une meilleure intégration économique, sociale et professionnelle.
Par conséquent, nous appelons le gouvernement du Québec à mettre fin immédiatement à la crise et lui demandons de redresser le financement de la francisation, afin qu’elle permette la pleine intégration des personnes immigrantes à la société québécoise.
Signataires
- Nadine Bédard-St-Pierre, première vice-présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
- Caroline Senneville, présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN)
- Denis Bolduc, secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
- Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
- Paul Doyon, premier vice-président de l’Union des producteurs agricoles (UPA)
- Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec (CPQ)