Lettre ouverte du président-directeur général du Conseil du patronat du Québec, Yves-Thomas Dorval.
Le Devoir, p. A7 – 23 novembre 2017
Huffington Post Québec, p. web – 24 novembre 2017
Le Soleil, p. 26 – 26 novembre 2017
On en parle trop peu, mais le ministère des Transports du Québec (MTQ) s’affaire depuis cet été à élaborer une première politique québécoise de mobilité durable (PQMD), qui doit couvrir la période 2018-2030.
Cette politique à vocation interministérielle doit devenir un levier pour la prospérité économique de l’ensemble de nos territoires, nos villes et nos régions, en améliorant l’efficacité des transports et la qualité des infrastructures. Les dernières élections municipales ont démontré l’importance de la mobilité dans les aspirations économiques, environnementales et sociales de tous les usagers, citoyens ou entreprises.
Le transport : clé de voûte de nos ambitions énergétiques et climatiques
En prévision de l’Accord de Paris, en 2015, le gouvernement s’est engagé à réduire globalement de 37,5 % les GES d’ici 2030. Pour élaborer cette cible, le scénario d’amener les émissions du transport sous la barre de 20 Mt/an a été retenu. Pourtant, il faut savoir qu’entre 1990 et 2014, elles sont passées de 28 Mt/an à 35 Mt/an ! Parallèlement, les industries ont réduit de 20 % leurs émissions depuis 1990 (et continueront de les réduire encore), mais leurs gains ont été effacés par le transport. Les industries ne peuvent pas faire les frais plus longtemps d’un manque de solutions plus énergiques et adéquates du côté des transports.
C’est donc dire que, mathématiquement, la future PQMD devra viser une réduction des GES de 30 % par rapport à 1990, c’est-à-dire, au moins 45 % par rapport à la situation actuelle pour le transport, pour espérer s’arrimer aux objectifs du Plan d’action contre les changements climatiques (PACC) et de la Politique énergétique 2030.
Il apparaît évident qu’il faudra allouer ici plus de ressources au transport individuel et collectif des personnes, ainsi qu’au transport des marchandises et à leurs chaînes logistiques, afin que cette transition puisse contribuer au développement économique et non lui nuire. Les citoyens et les collectivités, de même que les entreprises et les transporteurs dont elles dépendent, devront pouvoir compter sur un ensemble d’actions plus ambitieuses et plus efficaces. Le temps presse.
Pour ce faire, il importe de resserrer rapidement la cohésion des trois principaux ministères impliqués, car, au moment même où une équipe dédiée au MTQ travaille sur la PQMD (soutenue par un comité diversifié de parties prenantes importantes), l’organisme Transition énergétique Québec (TEQ) et le nouveau conseil de gestion du Fonds vert mènent également des consultations en vue de proposer, eux aussi, de nouveaux outils.
Transport, énergie, environnement : trois silos qu’il faut briser
Quels seront les programmes et mesures pour soutenir la mise en œuvre de la PQMD, de concert avec TEQ et le Fonds vert? Qui va les gérer? Comment? Au bénéfice de quelles clientèles? Quand? Avec quel financement?
Il reste trois mois au gouvernement avant son prochain budget pour faire le ménage de ses programmes et répondre à ces questions cruciales. Il devra compter sur la collaboration des municipalités et l’adhésion tant des citoyens que des entreprises.
Pour l’aider à mettre de l’ordre dans tout ça, il peut s’appuyer sur la collaboration d’un ensemble de parties prenantes engagé depuis presque cinq ans dans la recherche de solutions innovantes et structurantes. Il serait fou de s’en priver, mais il doit, à l’image des intérêts parfois divergents de ces groupes qui ont décidé de s’investir dans un dialogue proactif, briser ses propres silos politiques ou administratifs : qu’il s’agisse de ses cabinets ou de ses équipes ministériels.
Le premier ministre et les trois ministres principalement concernés devront développer un niveau de synergie rarement vu. C’est tout un défi, mais c’est également une occasion exceptionnelle. Ce changement de culture est déterminant pour accomplir les grandes réalisations que nous devons aux générations actuelles et futures. Mais, comme on dit, le « call » doit venir d’en haut et se rendre partout dans l’appareil étatique, sans compromission.