La prospérité constitue toujours un défi de taille pour le Québec. Être prospère nous permet de vivre selon des valeurs auxquelles nous sommes attachés, notamment en nous offrant un filet de sécurité presqu’étanche face à la maladie ou à toute autre situation qui nous priverait de revenus temporairement ou de façon permanente. Or, de plus en plus d’écrits récents nous interpellent.
Sommes-nous face à un nouvel environnement qui transforme le portrait de ce que nous avons connu et vécu depuis la deuxième guerre mondiale? À savoir, un accroissement de l’écart entre les riches et les pauvres, et cela de façon plus marquée aux États-Unis, mais aussi présent dans toutes nos sociétés occidentales. La vigilance face à ce phénomène nous interpelle. Et pourquoi?
L’après-guerre nous a donné une période de stabilité continue. L’importance de la classe moyenne a renforcé notre attachement à la démocratie vu l’attrait économique que donnait le système tel que nous le connaissons. Nous avons vu nos gouvernements multiplier les bénéfices à distribuer aux citoyens.
Éventuellement, nous avons aussi pu observer nos gouvernements financer ces services en s’endettant et par le fait même, laisser à d’autres, plus tard, le soin de rencontrer ces nouvelles obligations. Autrement dit, les citoyens voulaient des services accrus mais n’étaient pas prêts à en assumer la facture, si bien que la totalité des pays occidentaux se retrouvent aujourd’hui avec des niveaux d’endettement qui mettent précisément en péril ce même projet de société. Et, en plus, par une foule de moyens à leur disposition, les plus nantis sont capables d’éviter de payer la totalité de leurs impôts, si bien que l’écart entre les plus riches et les plus pauvres s’agrandit.
Aux États-Unis par exemple, la classe moyenne a vu son niveau de vie diminuer progressivement depuis 30 ans.
Que soulève cet écart entre les plus riches et les plus pauvres? Devons-nous nous en inquiéter? Ne nous a-t-on pas dit que lorsque l’eau monte pour quelques-uns, l’eau monte également pour tous! Après tout, la qualité de nos vies s’est améliorée.
Le Canada, quant à lui, a choisi une approche plus interventionniste de l’État. Pour certains, cela est néfaste. Pour moi, cela constitue une prime d’assurance pour maintenir une société civile et une paix sociale. Mais, en revanche, cet écart doit nous préoccuper.
Il doit nous préoccuper car il est en croissance. Dans un ouvrage qui a transformé le débat public sur ce sujet, l’économiste français Thomas Piketty nous livre une analyse préoccupante de ce phénomène. C’est d’ailleurs monsieur Piketty qui s’est valu en 2014 les premiers prix du meilleur livre en finance tant du Financial Times que de McKinsey. Le Harvard University Press qualifie ce livre en ces termes: une œuvre de grande originalité, de rigueur, un ouvrage ambitieux qui nous force à reconsidérer notre compréhension du monde.
Je reviendrai sur ce livre. Un ouvrage de grande envergure.