Prospérité, qualité de vie et entrepreneuriat

Chronique de Norma Kozhaya, vice-présidente à la recherche et économiste en chef du Conseil du patronat du Québec


Premières en Affaires, p. 8 – Février-Mars 2015


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_Février étant le mois de l’amour, et ce numéro du magazine Premières en Affaires étant consacré à l’entrepreneuriat, je vais vous parler de notions inséparables sur le plan économique : la prospérité, la qualité de vie et l’entrepreneuriat._

La prospérité est un état de bien-être auquel on aspire et que l’on se souhaite tous. Selon le dictionnaire Larousse, cet état, marqué par l’expansion et l’abondance, caractérise tout individu se trouvant dans une situation favorable.

Une façon de mesurer la prospérité d’un État est d’évaluer le niveau de ce qu’il produit, en utilisant le produit intérieur brut (PIB, et plus spécifiquement le PIB par habitant).

D’aucuns critiquent cette définition comme indicateur du niveau de vie et soulignent, à juste titre, qu’elle ne tient pas compte d’éléments comme la santé, la qualité de l’environnement, les inégalités sociales ou encore le temps consacré aux loisirs. Il s’agit d’ailleurs d’une des premières leçons à retenir en matière d’économie : le PIB par habitant n’est pas un indicateur parfait pour mesurer le bien-être.

Par conséquent, on a eu de plus en plus tendance, ces dernières années, à utiliser d’autres indicateurs pour mesurer la prospérité, tel l’Indice de développement humain (IDH) de l’ONU, qui tient compte, en plus du PIB, de l’espérance de vie et du niveau de scolarité, de même que des sondages de type Gallup, qui évaluent la satisfaction de la vie. Plus récemment, l’OCDE a sorti L’Indicateur du vivre mieux, qui combine un ensemble de critères objectifs et subjectifs(1).

Il s’avère que les pays les plus prospères sont aussi les plus heureux en moyenne! Les pays où le chômage est faible et les revenus élevés sont aussi ceux où les citoyens se déclarent le plus satisfaits de leur sort. Il n’y a aucune opposition entre la création de richesse, la prospérité et la qualité de vie, bien au contraire. Prospérité et qualité de vie font bon ménage, l’argent pouvant contribuer au bonheur, comme l’illustre très bien le graphique ci-dessous.

Indice de satisfaction de la vie





PIB par habitant

Source : Stevenson et Wolfers (2013)

La prospérité engendre des innovations fondamentales, qui ont réglé bien des problèmes économiques, sociaux et environnementaux, contribuant ainsi à la qualité de vie en société.

Les déterminants de la prospérité sont nombreux. On considère en général les investissements en capital physique, dont ceux en machinerie et en équipements, le capital humain, notamment le niveau d’éducation et la formation, ainsi que l’environnement fiscal et réglementaire. Ce sont toutes des conditions nécessaires, mais non suffisantes.

Un ingrédient essentiel de la prospérité demeure l’entrepreneuriat. Comme j’en avais abondamment parlé dans ma première chronique, les entrepreneurs sont les déclencheurs et les catalyseurs de la création de richesse. Ce sont des personnes orientent les ressources d’une société vers les usages à plus haute valeur ajoutée.

Comme le fondateur de la Fondation de l’entrepreneurship, organisme voué à la promotion du développement de la culture entrepreneuriale au Québec, Paul-Arthur Fortin, l’a si bien exprimé :
« L’entrepreneuriat, c’est faire de grandes choses avec de petits moyens. Faire de grandes choses avec de grands moyens, c’est de la gestion. Faire de petites choses avec de grands moyens, c’est de l’incompétence(2). » Et d’ajouter : « L’entreprise crée la richesse et l’emploi; l’entrepreneur crée l’entreprise(3). »

Continuons donc d’encourager nos entreprises et nos entrepreneurs, car il en va de notre prospérité et de notre bonheur.


  1. L’indicateur du vivre mieux comprend vingt-quatre critères, dont des mesures relatives à la richesse, à la santé, au logement et à la satisfaction de la vie. En 2014, l’OCDE a rendu publique une version de son indicateur pour les régions des pays membres, qui ne compte que onze critères. En 2011, deux chercheurs du Centre universitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO), Luc Godbout et Marcellin Joannis, avaient calculé L’Indice du Vivre mieux pour le Québec, en utilisant les 20 indicateurs retenus alors par l’OCDE. Le Québec faisait un peu mieux que le Canada. Et comme le Canada était alors au deuxième rang, tout juste derrière l’Australie, le Québec se serait retrouvé au premier rang mondial, ce qui est sûrement une bonne nouvelle. Les auteurs notaient toutefois du même souffle que cet indicateur ne tient pas compte de la dette et donc, pourrait-on dire, du bien-être des générations futures. À titre indicatif, le Canada occupe le quatrième rang mondial en 2014, et le Québec le sixième rang.
  2. « Douze vérités en développement local qu’on n’enseigne pas à l’école », Revue Gestion, volume 23, no 2, été 1998
  3. « La culture entrepreneuriale, un antidote à la pauvreté », pages 30-31, Éditions Transcontinental inc. 2003, et « Fondation de l’entrepreneurship – Historique ».
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