L’intelligence collective, un indicateur de prospérité 

Une société dite riche se mesure par une variété de facteurs tels le PIB et la croissance des emplois. Parmi ces indicateurs de prospérité se trouve également l’intelligence collective, sujet dont je veux maintenant vous entretenir. Selon le philosophe Pierre Lévy, l’intelligence collective est : « une intelligence partout distribuée, sans cesse valorisée, coordonnée en temps réel, qui aboutit à une mobilisation efficace des compétences ». Aujourd’hui la planète atteint un seuil de partage des connaissances sans précédent, d’autant plus accéléré par l’ouverture des plateformes et leur accessibilité.

De retour dans la belle province après des années passées en Europe, j’ai pris le temps d’observer les changements qui se sont opérés ici. Les constats que j’en ai faits ne sont pas uniques à Montréal mais à toute métropole tournée vers le savoir. Avant de vous présenter mes observations, faisons un rapide tour d’histoire.

Dans les années 80 et 90, le partage des connaissances comme nous le connaissons présentement n’existait pas. L’information circulait en vase clos et l’on pouvait capter des tranches de conversations dans les forums ou les tribunes. Si le sujet méritait d’être creusé, quelques illustres blogueurs se prêtaient à l’écriture d’un billet et l’impact (commentaires, débats) pouvait durer tout au plus quelques semaines. La collectivité n’en bénéficiait donc que très peu et la connaissance, elle, se diffusait lentement.

Depuis un peu moins de dix ans, maintenant que l’Internet s’organise en plateformes ouvertes et accessibles à tous, nous assistons à une diffusion des connaissances à grande échelle et parfois à une mobilisation collective qui en découle. Le journaliste Clay Shirky l’avait prédit dans un essai en introduisant la notion de « surplus cognitif ». Dans le passé, le surplus cognitif que nous avons tous s’évacuait en fin de journée à regarder la télévision. Désormais, selon monsieur Shirky, nous déchargeons ce surplus sur « de nouvelles formes d’expression influentes et de grande valeur » et c’est là, la source de richesse pour une société.

Une des nouvelles formes d’expression influentes : le crowdscourcing

Le crowdsourcing, facilité par la démocratisation des technologies et la rencontre d’individus créateurs de sens, c’est l’acte de solliciter le public pour la réalisation d’une tâche spécifique. En France, on le désigne par « approvisionnement par la foule » ou « externalisation ouverte ».

De nombreux services, des plus simples tel Yelp permettant à l’internaute de publier des photos d’un lieu visité utiles pour les futurs visiteurs, aux plus complexes comme Innocentive qui lance le défi au public de résoudre une problématique technique moyennant une compensation financière, éloigneraient les citoyens de la paresse intellectuelle que décrivait Shirky et les rapprocheraient des stimuli de création de valeur.

Autre exemple plus près de nous, je vois mtl et son jury citoyen qui demande “aux Montréalais de déterminer eux-mêmes les indicateurs de performance qui mesureront la progression de notre prospérité collective.”

Il existe aussi des sites de pétitions pour le bien social tel Change.org avec ses 70 millions d’utilisateurs dans 196 pays. Change.org a pour premiers mérites de permettre au grand public d’être informé sur les défis planétaires de tous ordres et de stimuler l’engagement via la signature d’une pétition. Ce modèle porte ses fruits : il permet de remporter des victoires plus rapidement par l’influence de la collectivité que s’il fallait passer par le moule de la bureaucratie. « 24 million people have experienced victory on our platform — meaning they’ve signed a petition that has gone on to win, where the decision-maker to whom the petition is directed agree to do what the petition requests ».

Comment le crowdsourcing contribue-t-il à la prospérité ?

Nous devenons « consomm-acteurs ». Nous collaborons entre nous, parfois entre amis ou collègues, parfois entre parfaits étrangers. L’élément unificateur : un intérêt commun. À force de voir les fruits de nos contributions collectives, nous devenons plus curieux de ce qui nous entoure et nous nous transformons en ambassadeurs et agents de changement. D’où les phénomènes de diffusion accélérée et de connaissance collective.

La connaissance cesse de devenir la chasse gardée de l’élite intellectuelle. L’intelligence collective décloisonnerait « les langues, les cultures et les disciplines » (Pierre Lévy) sans qu’il n’y ait de connaissance scientifique.

Impliquons le citoyen dans des sphères qui jadis ne lui étaient pas réservées et donnons-lui accès à la création de solutions. Je pense notamment au domaine de la finance. En voyez-vous d’autres ?

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