De l’importance d’oser

Chronique de Norma Kozhaya, vice-présidente à la recherche et économiste en chef du Conseil du patronat du Québec


Premières en Affaires, p. 10 – 30 septembre 2014


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À quelques jours de la publication du Bulletin de la prospérité 2014 par le Conseil du patronat du Québec, j’ai choisi de partager avec vous mon point de vue sur l’un des graphiques les plus significatifs de l’étude, soit celui mesurant l’intensité entrepreneuriale.

La preuve n’est plus à faire que l’action entrepreneuriale est au cour même de la création de la richesse et de la prospérité; elle en est non seulement une condition nécessaire, mais aussi le déclencheur et le catalyseur. Les études économiques montrent, en effet, un lien direct entre la croissance de l’entrepreneuriat et la création d’emplois, la croissance du PIB et la croissance de la productivité à long terme.

Les entrepreneurs sont des personnes qui innovent, qui conçoivent de nouvelles façons de faire et qui orientent les ressources disponibles vers des usages à haute valeur ajoutée pour répondre aux besoins des consommateurs ou à ceux d’autres producteurs. Ce sont aussi des gens d’affaires qui n’ont pas froid aux yeux et qui osent prendre des risques.

Au-delà du volet économique, le phénomène entrepreneurial comporte aussi une dimension humaine et sociale. L’entrepreneuriat peut être vu comme un état d’esprit, une culture, une façon d’être et de vivre. Être entrepreneur signifie être capable de se prendre en main, de ne pas attendre que les solutions viennent de l’extérieur, notamment des gouvernements. C’est aussi être disposé à fournir un effort soutenu et à faire preuve de persévérance.


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Or, selon les plus récentes données présentées dans le graphique suivant, le Québec se situe, encore cette année, en dessous de la moyenne canadienne et au dernier rang des provinces à l’étude, soit l’Ontario, la Colombie-Britannique et l’Alberta, et ce, tant sur le plan du bassin d’entrepreneurs que celui du nombre d’entreprises. Ce n’est pas une bonne nouvelle.

Cette faiblesse sur le plan de l’entrepreneuriat est, par ailleurs, documentée sous d’autres formes par les études de la Fondation de l’entrepreneurship. À titre d’exemple, en 2014, 19,1 % des Québécois affirment avoir l’intention de créer une nouvelle entreprise ou de reprendre une entreprise existante, contre 27,6% dans le reste du Canada. Ce résultat est observé année après année. Il semble exister au Québec une certaine rareté d’entrepreneurs intéressés, motivés et aptes à lancer une nouvelle entreprise ou à prendre la relève d’une entreprise existante. Mais est-ce une fatalité?

Sûrement pas. Agir sur l’activité entrepreneuriale exige, selon moi, de travailler sur plusieurs aspects. Tout un chacun doit y contribuer. Tout d’abord, le gouvernement doit s’assurer de créer un environnement fiscal et réglementaire propice qui ne décourage pas la prise de risques par les entrepreneurs.

Ensuite, il s’avère aussi essentiel de stimuler en amont la culture entrepreneuriale elle-même, de donner le goût de l’entrepreneuriat et de susciter des vocations. Il s’agit là toutefois d’un travail de longue haleine. On peut s’employer dès maintenant à susciter une passion de l’entrepreneuriat chez les jeunes en les exposant, par exemple, dès l’école primaire, à des modèles de réussite entrepreneuriale.

Parallèlement, il faut que la population réalise que les vraies responsables de la création de richesse et de l’amélioration du niveau de vie dans une économie sont les entreprises et les entrepreneurs.

Malgré l’imposant secteur public au Québec, sur les 4 millions de travailleurs, 65 % d’entre eux travaillent dans une entreprise du secteur privé, 21 % dans le secteur public et 13 % sont des travailleurs autonomes. Étant donné les différents défis auxquels nous faisons face, que ce soit sur le plan démographique, de la concurrence mondiale ou des finances publiques, la valorisation de l’entrepreneuriat et des entreprises doit absolument figurer à l’ordre du jour et être prioritaire.

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