« La démocratie et la transparence imposent que le gouvernement fédéral recule sur le projet de loi C-4
Lettre ouverte d’Yves-Thomas Dorval, président-directeur général du CPQ
Passé sous le radar médiatique alors qu’il est actuellement l’objet d’analyses à la Chambre des communes, le projet de loi C-4 du gouvernement du Canada remet en discussion des principes qui sont pourtant les reflets d’une saine démocratie et d’une vraie transparence. En fait, il propose l’abolition du vote au scrutin secret obligatoire dans le processus d’accréditation (et de révocation d’accréditation) syndicale pour les travailleurs qui relèvent de la juridiction fédérale, donc dans les secteurs des télécommunications, des banques, du transport maritime, ferroviaire et aérien; ainsi que l’abolition de l’obligation, adoptée par le gouvernement précédent, pour les associations de travailleurs de tous les secteurs de dévoiler leurs états financiers et l’usage qu’elles font des cotisations de leurs membres.
Scrutin de représentation secret obligatoire
Le vote au scrutin secret, en tant que principe démocratique fondamental, est actuellement utilisé par la très grande majorité des provinces canadiennes dans le cadre du processus d’accréditation d’unités syndicales. Certaines juridictions, comme la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador, ont même modifié récemment leur législation pour adopter ce système.
Alors que le gouvernement précédent avait aussi fait le pas dans cette direction, le gouvernement fédéral actuel entend rétablir le système d’accréditation par carte. Ce système, actuellement en vigueur au Québec et dans trois autres provinces, prévoit qu’une unité de négociation puisse être accréditée par la simple preuve d’adhésion de plus de 50 % des travailleurs au syndicat. Cela implique que les travailleurs souhaitant se syndiquer n’ont pas l’obligation d’informer l’entièreté des employés de leurs démarches pour l’ouverture d’une cellule syndicale.
Ce faisant, on ne peut jamais s’assurer que la volonté réelle des employés soit bien exprimée et l’employé doit dévoiler son allégeance à ses collègues, donc il y a plus de risques de gestes d’intimidation et d’un climat de travail hostile que par le vote secret.
Nous ne nions pas que le vote au scrutin secret obligatoire puisse réduire les chances d’une unité syndicale d’être accréditée, mais tel n’est pas le but de la revendication patronale. Le fait que le scrutin secret se tienne après que tous les employés aient été informés de tous les arguments et en aient débattu peut effectivement faire en sorte que le syndicat récolte moins d’appuis. Mais nous ne voyons pas en quoi la prise d’une décision d’adhérer ou non à un syndicat suivant un processus objectif d’information peut être considérée comme antisyndicale.
Transparence financière
Contrairement à ce que se propose de faire le gouvernement fédéral, il faut qu’une réglementation plus stricte encadre la divulgation des états financiers, afin de favoriser une plus grande transparence des organisations de travailleurs. Il est tout à fait légitime que le montant des cotisations que versent obligatoirement les travailleurs à leur syndicat en vertu de la formule Rand , soit rendu public, de même que l’utilisation qui en est faite. Or, ce sont les syndicats eux-mêmes qui déterminent ce qu’ils veulent dévoiler.
Soulignons qu’environ 4 G$ de cotisations syndicales sont versés annuellement par les travailleurs au Canada, dont la déductibilité aux impôts coûte 500 M$ annuellement au trésor fédéral. Il est légitime que les travailleurs qui versent des cotisations syndicales sachent comment est dépensé leur argent. Les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France et l’Australie ont tous déjà adopté des mesures visant la divulgation publique de renseignements financiers de ces organisations.
La formule Rand oblige la totalité des salariés d’une unité de négociation, peu importe leur adhésion ou non au syndicat, de payer une cotisation déterminée par le syndicat. On ne peut donc accepter que les cotisations syndicales obligatoires puissent être utilisées à des fins autres que celles liées aux relations du travail. Les activités à caractère politique ou idéologique des syndicats devraient être financées uniquement par des cotisations volontaires.
Enfin, toute comparaison avec des associations patronales est non-pertinente, puisque les cotisations de ces associations sont uniquement sur base volontaire et les employeurs qui ne sont pas d’accord avec leurs associations n’ont pas à verser de cotisation obligatoire, alors que les travailleurs, eux, ne peuvent pas s’en soustraire. Il ne s’agit donc pas d’une tentative de la partie patronale de fragiliser le droit aux travailleurs de se syndiquer, mais plutôt de garantir un système juste où l’équilibre des forces patronales et syndicales est respecté. »
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Regroupant plusieurs des plus grandes entreprises du Québec, le Conseil du patronat du Québec réunit aussi la vaste majorité des associations patronales sectorielles, ce qui en fait la seule confédération patronale du Québec. Il représente directement et indirectement plus de 70 000 employeurs de toutes tailles, tant du secteur privé que public, ayant des activités au Québec.
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Camilla Sironi
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